L'Histoire du biscuit de porcelaine

L'Histoire du biscuit de porcelaine

Attention les gourmands ! Le biscuit dont nous allons parler vous fera mal aux dents. Buste, paysanne, reine de bal ou centre de table, ils sont d’une blancheur immaculée pour décorer les intérieurs. Leur production commence au XVIIIème siècle au sein d’une manufacture française qui les distribue vite dans toute l’Europe. Mais qu’est-ce que le biscuit ? Quelle est son histoire ? En quoi est-il fait, et comment ?

LA CRÉATION DU BISCUIT, UN ENJEU ÉCONOMIQUE

Au XVIIIème siècle, les aristocrates adorent les objets exotiques : laques, coton des Indes et surtout la porcelaine. Cette dernière, née en Chine au VIIème-VIIIème siècle, fascine par sa blancheur et sa translucidité. Les Européens en font venir d’Orient pour satisfaire leur curiosité. Ils essayent par ailleurs de trouver le secret de cette production dès le XVIIème siècle, mais sans succès. Il leur manque le composant essentiel à sa fabrication : le kaolin.


cheveux en porcelaine de la maison de Samson imitation SaxePaire de chevaux de la maison Samson imitant les pièces de Saxe


Au tout début du XVIIIème, on découvre un gisement en Allemagne dans la Saxe. Les procédés de fabrication sont mis à jour en 1708 et la manufacture de Meissen commence les premières productions de porcelaine d’Europe. Les collectionneurs vont alors se tourner vers ce nouveau lieu de production pour satisfaire leur goût, au grand désespoir de Colbert, ministre des Finances. Celui-ci tient l’économie française d’une main de fer, il met en valeur les manufactures françaises dans tous les domaines : textiles, mobiliers, glaces… Mais les dépenses en porcelaine lui échappent et elles représentent une fuite de capitaux vers l’étranger.

On décide alors de créer une manufacture en France pour concurrencer la porcelaine de Saxe. En 1745, le roi accorde à une manufacture installée dans le château de Vincennes, le privilège exclusif de faire de la porcelaine « façon de Saxe, peinte et dorée à figure humaine ». Malheureusement, cela n’a pas beaucoup de succès au départ. On produit surtout des fleurs de porcelaine pour agrémenter des bouquets artificiels dans des vases venant encore du pays voisin.


PAIRE DE PETITES CONSOLES ROCAILLE DANS LE STYLE DE LA MANUFACTURE DE MEISSENPaire de petites consoles rocaille dans le style de la manufacture de Meissen


Ne possédant pas le secret de la porcelaine dure, la manufacture de Vincennes développe une technique utilisant de la fritte, une pâte de verre et de cristal qui demeure blanche et opaque. Elle imite d’abord les formes allemandes, mais les artisans remarquent que la couverte, glaçure transparente ou colorée qui revêt les pièces, fait du tort à la finesse de leur travail. En effet, elle s’accumule dans les plis et dans les détails fouillés des sculptures françaises ce qui en diminue la qualité. En 1753, Jean-Jacques Bachelier fait réaliser des figurines laissées délibérément sans émail et sans décor. Ainsi naît le biscuit.


Groupe en biscuit de porcelaine illustrant "Les travaux des amours" dans le style des enfants Falconet.


C’est le début d’un immense succès. Louis XV, qui a racheté la manufacture sur les conseils de Mme de Pompadour, la déplace à Sèvres en 1756. Elle gardera le nom de manufacture de Sèvres jusqu’à aujourd’hui. Le roi fait de grandes commandes pour sa propre décoration, mais aussi pour en faire des cadeaux diplomatiques. On retrouve de la porcelaine de Sèvres dans toutes les cours européennes. En recevant ces œuvres délicates, les souverains étrangers découvrent le goût du biscuit. Arrivent alors un grand nombre de commandes pour la manufacture de Sèvres, parfois en délaissant les productions de Meissen. La France reprend le dessus du marché européen.


Biscuit de Diane tenant une lionne en laisse d'après Carrière Belleuse, XIXème siècle

La révolution de la porcelaine française à lieu en 1770 avec la découverte de kaolin sur le territoire. Arrive alors la pâte dure, véritable porcelaine. Louis XV achète le terrain de Saint Yrieux où se trouve la carrière exploitant la précieuse argile. Il faut tout de même attendre 1774 pour que son utilisation se mette en place à Sèvres. La fabrication devient moins longue et moins coûteuse, mais il faut réussir à générer des feux quatre fois plus puissants. Elle est d’abord réservée aux biscuits, car on ne maîtrise pas encore les couvertes et les émaux. Les petites sculptures ont alors une blancheur plus accusée, un poli doux et un son presque cristallin. Cette technique permet aussi de produire des grandes dimensions. Ce blanc mat imite le grain du marbre statuaire et fait rentrer le biscuit de porcelaine comme véritable œuvre d’art, non plus comme simple décoration.


Biscuit de Sèvres ou copie ?

Mais la manufacture de Sèvres n’est pas la seule à produire des biscuits. Devant leur grand succès, on trouve vite des copies de la porcelaine tendre de Sèvres. Même si c’est interdit, certaines manufactures concurrentes n’hésitent pas à recruter les artisans directement à la manufacture royale leur proposant des salaires beaucoup plus élevés. En effet, se contentant seulement de copier les modèles existants, ils n’ont pas besoin de recruter un sculpteur de renom pour en confectionner.

Les biscuits sont d’autant plus faciles à copier qu’ils n’ont pas de marque. Les marques servent en général à déterminer si une pièce est authentique ou non. La manufacture de Sèvres du XVIIIème présente le chiffre royal, deux L affrontés ainsi qu’un chiffre indiquant la date de création le tout sous la couverte. Cependant, lorsque la décision est prise de créer des pièces sans émail, une problématique se soulève. Qu’est-ce qui empêchera une autre manufacture d’acheter des pièces vierges de toute décoration avec la marque de Sèvres et de leur apposer un « sur décor » pour les faire passer pour des originaux ? On décide alors de ne pas apposer la marque sur les biscuits.


service à thé marques de Sèvres et des TuileriesMarques de la manufacture de Sèvres sous un service à thé XIXème

On ne peut pas non plus se fier au terme Sèvres apposé sous une de ces statuettes. Ce n’est pas une garantie de sa provenance puisque plusieurs manufactures se sont installées dans la ville pour bénéficier de la renommée de la manufacture royale. Pour distinguer un biscuit de porcelaine de Sèvre, il faut donc étudier la qualité du travail, la qualité du matériau et le rendu détaillé de la sculpture ce que seuls les experts sont capables de reconnaître.

Enfin, la France n'est pas le seul pays à produire des biscuits. Toutes les cours européennes tentent de se doter de manufactures capables de réaliser ces précieux ornements. La manufacture de Meissen elle-même se met à produire des objets sans couverte pour rivaliser avec Sèvres sa grande concurrente.


Pourquoi le nom de « biscuit » ?

A l'origine, pour produire ce type de pièce, la pâte tendre, sans kaolin, était cuite deux fois d’où le terme de "bis – cuit". Avec la découverte de kaolin en France, les figurines non émaillées n’ont plus eu besoin que d’une seule cuisson, mais les productions de figurines restées blanches gardent ce nom.

Aujourd'hui, la définition de biscuit de porcelaine est : figure ou groupe en porcelaine cuite sans couverte, c’est-à-dire non émaillé.


Conclusion


Les biscuits sont toujours produits aujourd’hui dans de nombreuses manufactures européennes, mais Sèvres reste la référence de ce savoir-faire. Chaque année, des artistes contemporains sont invités à découvrir cette technique pour l’innover. Malgré son histoire ancienne, le biscuit reste ainsi une technique bien ancrée dans le monde contemporain.

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